La création du marché unique constitue l’une des plus grandes réussites de l’Union Européenne (UE). Ce marché a été instauré dans l’optique de créer au sein de l’UE un espace sans frontières intérieures dans lequel la libre circulation des biens est assurée. Si la réglementation en matière de denrées alimentaires est relativement harmonisée dans l’UE, des différences réglementaires subsistent, les États membres ayant à cœur de réglementer ce domaine à l’échelle nationale. De ce fait, les différences réglementaires qui existent entre les États membres entravent la libre circulation de certaines denrées alimentaires en Europe.
Le concept de reconnaissance mutuelle a été introduit à la suite de l’affaire du Cassis de Dijon, survenue il y a plus de 40 ans. Cette affaire avait, à l’époque, suscité de nombreux débats. Auparavant, le droit allemand prescrivait une teneur minimale en alcool pour les liqueurs de fruits, compliquant ainsi l’importation de telles boissons en Allemagne depuis les autres États membres. Toutefois, la législation a évolué à la suite de l’affaire du Cassis de Dijon. La Cour de justice de l’UE a rendu un arrêt statuant que des biens licitement produits et commercialisés dans un État membre doivent être acceptés dans tous les États membres de l’UE.
40 ans plus tard, nombreux sont ceux qui affirment que le principe de reconnaissance mutuelle n’a pas produit les effets escomptés en assurant l’accès au marché parallèlement à la diversité réglementaire au sein de l’UE. Le Règlement (CE) 764/2008 a été adopté en vue d’encadrer le principe de reconnaissance mutuelle. Toutefois, les opérateurs économiques se heurtaient toujours à des difficultés pour déployer leurs activités à travers l’UE. En cause, notamment, des retards d’enregistrement, des essais dupliqués et des coûts supplémentaires. Le Règlement 764/2008 a donc été jugé inefficace pour assurer la bonne application du principe de reconnaissance mutuelle.
D’où l’adoption du Règlement 2019/515, qui vient abroger le Règlement 764/2008. Ce nouveau règlement, entré en vigueur au 19 avril 2020, vise à améliorer la mise en œuvre du principe de reconnaissance mutuelle à travers les dispositions suivantes :
- « déclaration volontaire de reconnaissance mutuelle », qui permet aux entreprises de démontrer à des États membres que leurs produits sont commercialisés légalement dans un autre État membre de l’UE (déclaration qui peut être établie par un représentant autorisé);
- procédure d’évaluation que les autorités compétentes d’un État membre doivent suivre pour évaluer la conformité de biens. Dans le cadre de cette évaluation, les autorités compétentes sont tenues de prendre en compte la Déclaration de reconnaissance mutuelle, si elle a été mise à leur disposition. À noter que les opérateurs économiques conservent le droit de continuer à commercialiser leurs biens durant cette période d’évaluation sous réserve qu’une décision administrative n’ait pas été adoptée en vue de restreindre ou de refuser l’accès au marché ;
- obligation faite aux États membres de justifier clairement les motifs pour lesquels l’accès au marché a été restreint ou refusé, afin que leur décision puisse être évaluée au regard de sa compatibilité avec le principe de reconnaissance mutuelle ;
- procédure alternative pour aider les entreprises à résoudre les problèmes rencontrés par voie extrajudiciaire, baptisée SOLVIT. Ce mécanisme vise à faciliter le règlement des litiges en permettant aux entreprises de contester les décisions prises par des autorités compétentes. À la demande du centre SOLVIT, la Commission de l’UE examinera la question et émettra un avis quant à la compatibilité de la décision nationale avec le principe de reconnaissance mutuelle ;
- établissement de « points de contact produit » dans chaque État membre de l’UE, qui fournissent aux entreprises des conseils gratuits sur l’application du Règlement relatif à la reconnaissance mutuelle.
Nous espérons que l’application récente du Règlement 2019/515 améliorera la libre circulation des biens à travers l’Europe par la mise en place des outils suivants : déclaration volontaire de reconnaissance mutuelle, procédure concrète pour veiller à ce que les restrictions imposées sur des biens par des autorités compétentes soient clairement justifiées et présence de réseaux SOLVIT dans chaque État membre de l’UE.